Acta fabula
ISSN 2115-8037

Dossier critique
2017
Octobre 2017 (volume 18, numéro 8)
titre article
Romain Bionda

Impossibles théâtres impossibles

Bernadette Bost, Jean-François Louette & Bertrand Vibert (dir.), Impossibles théâtres xixe-xxe siècles, Chambéry, Comp’Act, 2005, EAN 9782876613300, 285 p.

1Il est des collectifs réussis, dont les excellents articles toutefois disparaissent avec leur volume dans les tréfonds de nos bibliothèques : c’est le cas de ce très bel et très riche Impossibles théâtres xixe-xxe siècles, dont les contributions ont été réunies en leur temps par Bernadette Bost, Jean-François Louette et Bertrand Vibert — ouvrage paru en 2005 chez Comp’Act, maison sise à Chambéry depuis lors disparue1. Si l’Atelier de théorie de Fabula a donné une seconde vie à l’article de Florence Naugrette (dans une version actualisée2), ce numéro d’Acta fabula, qui s’inscrit dans le projet mené cette année à Lausanne sur les « conditions du théâtre » en collaboration avec les revues Fabula-LhT et Acta Litt&Arts3, devrait permettre de remotiver les réflexions laissées pour la plupart lettre dormante dans les 23 contributions de ce riche volume de 285 pages. Profitons en effet de l’occasion pour entreprendre ce qui n’a pas encore été fait : tenter d’identifier, dans les propositions présentées dans Impossibles théâtres, les axes de réflexion principaux et en discuter les postulats4. Il sera question, dans les lignes qui suivent, de ce fantomatique « possible — ou […] impossible — théâtral5 » si difficile à appréhender.

2Il s’agira surtout de voir dans quelle mesure la notion d’impossible est utile pour baliser l’histoire du théâtre, puisqu’il s’agit là de l’un des buts affichés par le volume :

Depuis deux siècles, le théâtre de création, voire d’avant‑garde, est confronté de manière insistante et paradoxale à l’impossibilité même de sa représentation. Il y a là assurément le signe d’une crise, ou d’une série de crises, qui font désormais partie de l’histoire du théâtre, et qu’il convient de penser comme un tout6.

3Pour ce faire, on essaiera tout d’abord de rendre compte de l’usage, par les contributeurs, de la notion d’impossible et de ses avatars. L’introduction de Jean‑François Louette, qui tente de structurer le foisonnement des propositions, ne sera examinée de manière approfondie qu’ensuite. On se risquera enfin à engager une discussion : s’agit‑il de parler d’« impossibles théâtres » ou de « théâtres impossibles » ? L’expression admet‑elle le singulier ? L’adjectif lui-même, substantivé ou non, permet‑il d’articuler de manière optimale les données du problème soulevé par le volume ?

Impossibles théâtres

4Impossibles théâtres xixe-xxe siècles s’organise chronologiquement, depuis le « lever de rideau » de J.‑F. Louette jusqu’au « rideau » de Jean‑Pierre Ryngaert. L’étude de Jean‑Marie Thomasseau ouvre la première section intitulée « Des monstres romantiques au règne de la féerie ». Elle concerne les « scènes historiques » de Ludovic Vitet qui « a donné l’impulsion initiale à un des changements majeurs de l’écriture théâtrale au xixe siècle7 ». Il s’agit en effet manifestement, dans Impossibles théâtres, d’engager une réflexion centrée sur le caractère contingent de la mise en scène de textes (en l’occurrence préexistants) qu’on pourrait considérer comme étant « faits » ou « pas faits pour le théâtre ». Cette perspective est adoptée par les contributions de F. Naugrette sur Cromwell et sa célèbre Préface8, de Simone Bernard‑Griffiths sur Ahasvérus d’Edgar Quinet9, de Claudine Lacoste sur Une larme du diable de Théophile Gautier10, de Bertrand Vibert sur Le Château des cœurs de Gustave Flaubert11 et d’Hélène Laplace‑Claverie sur des ballets « délibérément voués à ne pas être représentés12 », en particulier de Félicien Champsaur, Hugues Rebell, Jean Richepin et Armand Silvestre. Philippe Andrès quant à lui se concentre sur le cas de Théodore de Banville, dont le théâtre a rencontré le succès, mais qu’on ne joue plus guère aujourd’hui. C’est alors toujours la possibilité d’une mise en scène qui est envisagée, mais « d’un point de vue de réception diachronique13 ». La réflexion de Roxane Martin sur les féeries — genre abondamment joué — va pour ainsi dire dans l’autre sens : c’est plutôt « l’impéritie de la critique littéraire à saisir un type d’écriture qui ne répondait pas à l’attente de ses préceptes14 » qui l’intéresse avec ses conséquences pour l’histoire du théâtre.

5On trouve une hypothèse historique en note de l’article de B. Vibert :

Car, on le sait, pour la première fois, celui‑ci [le théâtre du xixe siècle] voit s’opposer les gens de métier, qui fournissent et montent des pièces, et les écrivains et les poètes, qui publient des œuvres dramatiques dont le prolongement et la réalisation sur scène deviennent pour le moins problématiques et improbables15.

6Les « impossibles théâtres » seraient donc le fruit (ou l’arbre) d’une mésintelligence (volontaire ou accidentelle) entre « les poètes » et « les gens de métier » — disjonction entre, pour reprendre les mots de J.‑M. Thomasseau, « une écriture » et « son support scénique16 », qui débuterait avec Vitet et se prolongerait de diverses manières ensuite. Si toutefois la mise en scène des textes étudiés ici est refusée plus ou moins nettement par la plupart de leurs auteurs qui se libèrent (plus ou moins nettement, toujours) des « possibilités scéniques du temps17 » (Vitet, Hugo, Quinet, Gautier, Champsaur, Rebell, Silvestre et Richepin), elle est par ailleurs recherchée en vain par certains (Flaubert). Quant à savoir si d’autres (les auteurs de fééries, Banville) visaient la « possibilité » éternelle (si l’on veut), c’est encore une autre affaire.

7La contribution de Mireille Losco, qui se penche sur Axël d’Auguste de Villiers de l’Isle‑Adam18, initie la deuxième section nommée « Entre fin de siècle et avant‑garde ». Elle est suivie par celles de René-Pierre Colin sur Les Cuirs de bœuf de Georges Polti (dont on connaît mieux sans doute L’Art d’inventer les Personnages ou encore Les 36 Situations dramatiques19), de Patrick Besnier sur La Seine de Raymond Roussel20, de Dominique Massonnaud sur les compositions de Vassily Kandinsky21, de Florence Baillet sur Die letzten Tage der Menschheit de Karl Kraus22 et de Jacqueline Bernard sur Mouchoir de nuages de Tristan Tzara23. Là encore il s’agit de textes (Villiers de l’Isle‑Adam, Polti, Roussel, Kraus) ou de projets (Kandinsky) qui pour la plupart, pour une raison ou pour une autre, ne rencontrent pas la scène, ou seulement à l’occasion de quelques représentations (Tzara). Mais à la différence peut‑être des cas examinés de la période précédente, la mise en scène n’est pas majoritairement refusée d’emblée, ou alors le refus est en partie posture24:

Villiers, parfaitement conscient de la difficulté scénique de son œuvre, s’est contenté d’en donner des lectures d’extraits devant un public choisi, justifiant ainsi sa démarche : « Je ne pourrai, ce soir, vous en communiquer que quelques fragments, l’œuvre étant conçue dans des dimensions anormales » ; « C’est assez vous dire que le drame d’Axël n’est nullement écrit pour la scène et que la seule idée de sa représentation semble à l’auteur lui-même à peu près inadmissible ». Nous savons qu’en réalité Villiers rêvait secrètement que son drame fût porté à la scène, même s’il reconnaissait la difficulté du projet25.

8Kraus, qui « refus[e] aux metteurs en scène majeurs des années 20 qu’étaient Max Reinhardt et Erwin Piscator l’autorisation de le [son texte] porter à la scène », « aspirait cependant à sa mise en scène, puisqu’il rédigea vers 1930 une version scénique de cette œuvre26 ». Idem en ce qui concerne Polti :

Conscient de sa hardiesse, l’auteur déclare dans un « avertissement préalable » [à son miracle en douze vitraux de 1899] qu’il tient une variante à la disposition de ses futurs metteurs en scène.

9En cela, Kraus et Polti diffèrent de Hugo qui s’était contenté d’évoquer la possibilité d’écrire une version de Cromwell plus conforme à la scène sans pour autant passer à l’acte :

S’il arrivait que la censure dramatique, comprenant combien cette innocente, exacte et consciencieuse image de Cromwell et de son temps est prise en dehors de notre époque, lui permît l’accès au théâtre, l’auteur, mais dans ce cas seulement, pourrait extraire de ce drame une pièce qui se hasarderait alors sur la scène, et serait sifflée27.

10Quant à Kandinsky, qu’on a souvent réduit à « un peintre qui se serait essayé à l’art dramatique28 », il élabore en réalité de véritables « partitions théâtrales » : ce sont, après le refus de Constantin Stanislavski, les événements de 1914‑1918 qui « f[ont] obstacle à la concrétisation des projets de théâtre29 ». (On ne sait pas grand chose des projets de Roussel qui « conserv[e] La Seine parmi ses papiers, sans la publier ni la faire jouer30 » alors même qu’il en aurait eu les moyens — au moins financiers, précise P. Besnier31.)

11La troisième section, « Expériences extrêmes », est introduite par l’étude de Nathalie Fournier des « dispositifs énonciatifs […] dans La Dernière Bande de Beckett32 ». Elle est suivie par celles de Bernadette Bost sur Si l’été revenait d’Arthur Adamov33, de Brigitte Ferrato‑Combe sur le théâtre de Nathalie Sarraute34, d’Anick Brillant‑Annequin sur Et il passèrent des menottes aux fleurs de Fernando Arrabal35, de Françoise Rouffiat sur Portrait de Dora d’Hélène Cixous36, d’Hélène Kuntz sur HamletMachine de Heiner Müller37, de Louis Dieuzaide sur l’acteur selon Novarina38 et enfin de Jean‑Pierre Ryngaert sur le « théâtre dit illisible39 ». Comme l’indique son titre, cette section concerne des expériences : ces textes ont été joués du vivant de leur auteur, sur scène (Beckett, Sarraute, Arrabal, Cixous, Müller, Novarina — même si H. Kuntz n’analyse pas de représentation théâtrale de Hamlet-Machine) ou à la radio (Adamov, Sarraute). L’impossible, pour les cas étudiés dans cette section, s’apparente à une mise en cause radicale de ce qui peut « faire théâtre » : du dialogue (Beckett, Sarraute), du contrat de représentation (Arrabal), du texte (Cixous), voire de la possibilité même du théâtre, alors « mis en pièces40 » (Müller) — même si, dans le cas de Cixous, « l’hystérisation du texte théâtral » de Portrait de Dora, malgré sa manifeste virtuosité (trouvé‑je du moins),« est sans doute le produit d’une certaine inexpérience de l’écriture dramatique41 ». Le théâtre ici considéré a contribué à en repousser les « limites », à la manière de Novarina qui par son œuvre « convie le travail scénique […] à l’impossibilité de certaines tâches » :

les textes impossibles — textes théâtraux ou essais sur le théâtre — ont le plus souvent constitué des points de butée fructueux, imposant des déplacements esthétiques dans le jeu de l’acteur mais aussi dans la conception éthique de sa fonction42.

12De fait, cette section du livre montre comment ce qui a pu sembler a priori impossible, parfois aux auteurs eux‑mêmes (Sarraute) ou à la critique (Adamov), a finalement joué un rôle productif. À propos de Si l’été revenait, B. Bost écrit :

Reste la question des moyens scéniques susceptibles de rendre sensible cette dimension spectrale, et lisible la scène mentale du rêve. Impossible ou pas, la pièce « suédoise » d’Adamov a été montée au moins quatre fois […].
[…]
Ces portes [qui séparent les divers états de conscience] battent entre les rêves de Si l’été revenait, et l’expérience de ces metteurs en scène [Michel Berto, Gilles Chavassieux et Isabelle Pousseur] a prouvé que le battement, comme les états de conscience et le vent de la mort lui-même, pouvaient être visibles, sensibles. Un théâtre de l’extrême ; la théâtralité même43.

13Alors : « impossible », « ou pas » ?

L’Impossible théâtral

14J.-P. Ryngaert est d’avis qu’aujourd’hui

il n’existe plus de théâtre impossible, puisque la lecture du texte n’a pas d’importance et que la représentation décide d’une forme scénique qui ne serait aucunement commandée par le texte44.

15C’est, selon J.-P. Ryngaert (qui restreint là peut‑être le « théâtre impossible » à la mise en scène de textes préexistants), parce que la mise en scène ne chercherait plus à montrer une (sur)interprétation d’un texte, mais plutôt à en faire « usage », que plus aucun texte ne serait impossible sur scène. On peut toutefois se demander si l’impossible, de nos jours, n’est pas allé se loger ailleurs. Bien des textes examinés dans Impossibles théâtres ne sont jamais joués aujourd’hui — simplement peut‑être parce qu’ils n’intéressent personne. Dans le texte introductif, J.–F. Louette déclare en parlant de l’audace de Hugo :

Tout théâtre de l’impossible relèverait en ce sens d’un « As I like it. » Tandis que As you like it, et pardon à Shakespeare pour ce détournement de titre, résumerait la formule du théâtre trop adapté à son public45.

16Le possible théâtral serait donc aussi affaire d’intérêt, de désir — qu’il soit à vrai dire (dans certains cas) réciproque entre un I et un you, ou (dans d’autres) qu’il ne le soit pas : l’impossible n’est‑il pas rendu possible dès lors qu’il attire les bonnes personnes ? À l’inverse, si le possible est indésirable, n’en devient-il pas impossible ? C’est bien d’ailleurs ce que pointe J.‑F. Louette :

En sens inverse, la tragédie pure, si longtemps au somment du système des genres, est-elle encore possible — « scriptible » — aujourd’hui ? Ou morte et enterrée à jamais ? Dans un autre genre, Théodore de Banville fut beaucoup joué : qui se risquerait à le porter à la scène aujourd’hui ?46

17Il s’est passé l’inverse concernant Lorenzaccio d’Alfred de Musset qui « du théâtre romantique […] est aujourd’hui presque le seul grand drame qu’il demeure possible de jouer47 ». « Possible », oui… ou intéressant48. Relisons à ce titre l’appel de Christian Biet :

On souhaiterait que les directeurs de théâtre, [sic] proposent en représentation, outre quelques Corneille, Racine, Molière, Marivaux, Goldoni ou Beaumarchais, des tragédies sanglantes du début du xviie siècle, des tragédies de Rotrou, même de Thomas Corneille, ou des comédies peu ou jamais jouées depuis deux ou trois siècles, étonnantes, et maintenant publiées dans des éditions modernes. N’y a‑t‑il donc rien à faire de Hardy, de Cyrano de Bergerac, de Beys, de Mareschal, de Scarron, de Lesage, Dancourt, Regnard et des 350 comédies écrites entre 1680 et 1730, du théâtre de Voltaire ou de celui de Diderot ? Qu’on ne réponde pas qu’ils sont mineurs, cette distinction a vécu. Qu’on ne dise pas qu’il est impossible d’en donner quelque peu, ne serait‑ce qu’en première ou en seconde partie de spectacle, ce serait après tout renouer avec une tradition malheureusement perdue… Car si l’on veut que le répertoire intéresse et propose de nouvelles significations, il faut non seulement le relire, mais aussi l’étoffer, le redécouvrir, pour le rejouer49.

18Bref, cette question de l’intérêt (et de ses conditions) mériterait d’être explicitement liée à la réflexion sur l’impossible théâtral, d’autant plus qu’elle traverse en filigrane nombre de propositions.

19Ce qui est frappant en tout cas, et on le comprend étant donné la variété des « impossibles » considérés dans le volume qui nous intéresse ici, c’est la prudence adoptée dans la plupart des contributions au sujet du caractère véritablement impossible de la mise en scène des textes étudiés (puisqu’il s’agit principalement de textes). Par exemple, J.‑M. Thomasseau précise à propos de Vitet, censé ouvrir la voie à une « école de l’impossible théâtre », que « [l]’impossible théâtre à la Vitet n’était […] pas un théâtre impossible50. »

En souhaitant […] écrire un théâtre scéniquement « impossible », Vitet a, sans toujours mesurer les conséquences ultimes de son innovation, à la fois mis au jour les limites de la scénographie de son temps et créé les conditions d’autres possibles dramatiques. Un tel programme ne pouvait au fond manquer de séduire. Aussi, sans que l’on puisse tout à fait parler d’une « école historique d’un impossible théâtre », un ensemble d’auteurs, dans le sillage de Vitet, donnera, pour la plus grande partie jusqu’en 1830, une suite de textes historiques pour théâtre de lecture, souvent accompagnés de préfaces et d’explications51.

20Si donc, dès Vitet et jusqu’au théâtre le plus contemporain, il n’y a eu que des impossibles théâtres qui n’étaient pas impossibles, de quel « impossible » exactement s’accommode l’histoire esquissée par le volume ? De l’impossible intéressant ? Certes l’impossible, sous les espèces de la « nouveauté » voire de la « transgression », est un moteur de l’histoire du théâtre (c’est l’une des thèses de ce livre). Mais l’impossible théâtral est peut‑être une notion trop vaste pour être maniée aisément : en raison de sa proximité avec le vocabulaire logique, on hésite à la lecture non seulement entre un impossible absolu et un impossible relatif, mais encore entre une foule d’impossibles relatifs à la nature différente. De quoi l’impossible est‑il exactement le nom ? Peut‑être ne peut‑il désigner en fait qu’une inadéquation au théâtre, ou plutôt une inadéquation à l’une, l’autre ou plusieurs de ses conditions — dimensions du théâtre dont il est sans doute plus facile d’écrire l’histoire…

21J.‑F. Louette annonce d’emblée qu’il ne s’agit pas avec Impossibles théâtres XIXe-XXe siècles de tenir un discours qui ferait définitivement le tour de son objet. À cet égard, le titre qu’il donne au « Lever de rideau », intitulé « Impossible e(s)t théâtral52 », est une pirouette : si la copule verbale « est » souligne l’identité entre l’impossible et le théâtral, le coordonnant « et », tout en rapprochant les termes, organise une manière de confrontation. Cette ambiguïté rejoint une autre du même ordre, qui a trait à l’antéposition ou à la postposition de l’adjectif « impossible » dans l’expression impossible théâtre ou théâtre impossible (variantes toutes deux attestées dans le volume, non systématisées). Grammaticalement, on sait que l’antéposition de certains adjectifs « modifi[e] directement le contenu notionnel du nom auquel ils se rapportent pour en faire une propriété complexe », tandis que la postposition « caractéris[e] directement le référent du GN [groupe nominal] » : « un rude chasseur est un chasseur accompli » tandis qu’« un chasseur rude est quelqu’un d’intrinsèquement rude53 ». Dès lors « impossible est théâtral » dans le cas des impossibles théâtres. Mais dans le cas du théâtre impossible, il ne l’est pas : « impossible et théâtral » se confrontent, le premier entravant le second. S’agira‑t‑il dès lors d’un impossible théâtral, c’est‑à‑dire d’un théâtral d’une nature particulière, à l’existence avérée mais contrariée dans l’une de ses dimensions (et non d’un impossible au caractère théâtral — le français a cela d’ennuyeux qu’on ne sait pas trop quel adjectif est substantivé dans un tel groupe nominal), ou d’un théâtral impossible, c’est‑à‑dire d’un théâtral (d’une théâtralité ?) dont l’existence est exclue (ou alors seulement sur les plans de l’idée ou du rêve) ?

22Si l’impossible peut éloigner du théâtre, écrit J.‑F. Louette, il présente aussi un intérêt théâtral : il peut être recherché par les créateurs pour l’écart (la provocation, le défi) qu’il peut manifester, à l’image de Hugo avec Cromwell (posture que J.‑F. Louette reformule) :

Admirons cette audace : l’impossibilité de jouer ma pièce manifeste non point son indignité, mais l’urgence d’une réforme esthétique globale ; j’ai raison contre (presque) tous, parce que je suis déjà ailleurs ou en avant54.

23De fait :

L’impossible, au théâtre, est relatif à un public, avec ses habitudes, et à l’Histoire, avec ses conditions. Ce qui est théâtralement impossible à un instant donné ne l’est que parce qu’en rupture profonde à un état du théâtre : avec l’état du techniquement faisable, ou de la difficulté maximale tolérable, ou du socialement recevable, ou du politiquement acceptable55.

24« Difficultés d’ordre technique ou politique », donc, mais aussi « tabous sociaux, qui définissent les limites du possible sur scène56 ».

Ce sont donc des conditions fort diverses (techniques, socio‑politiques, esthétiques, voire juridiques, point que notre colloque n’a sans doute pas assez exploré) qui déterminent l’impossible à un moment donné57.

25On pourrait à vrai dire en rajouter d’autres encore : ces conditions sont aussi d’ordre artistique, économique, moral et religieux — et insister encore plus sur le fait que « l’impossible » existe en relation à un moment et à un lieu donnés. C’est une évidence qui mérite d’être rappelée : il varie diachroniquement et synchroniquement. « L’impossible » est pluriel.

Les « trois visages » de l’impossible

26J.-F. Louette tente de compter ce pluriel, car l’impossible aurait « trois visages » : « l’impossible de contrainte », « l’impossible par mimétisme » et « l’impossible essentiel », même s’il déclare la classification des impossibles elle-même « impossible ». Peut‑être, une fois de plus, le terme « impossible » est‑il simplement un verrou logique ? Car hormis cela, la partition opérée par J.‑F. Louette semble pertinente. Le théâtre (la mise en scène ?) peut notamment être étudié à travers : 1. ses « contraintes » (même si le terme déjà utilisé de conditions est peut‑être préférable) ; 2. son « mimétisme » ou autrement dit dans sa capacité à représenter ; 3. ou encore par la considération de son hypothétique essence.

271. « D’un côté, donc, il y aurait l’impossible de contrainte, que cette dernière soit technique ou sociale (politique)58. » Sont citées la longueur de Cromwell ou le « sujet même » d’Ahasvérus (1834) d’Edgar Quinet59. En vertu toutefois de ce que l’on a déjà dit, l’« impossible de contrainte » est toujours susceptible de se révéler possible, car tout dépend toujours de tout, c’est‑à‑dire des conditions du théâtre : de production et de réception, toutes deux orientées par une histoire et un horizon, jamais homogènes par ailleurs dans la synchronie. Ces « contraintes » sont donc à la fois externes et internes au théâtre, et surtout elles ne sont pas uniquement des contraintes : elles prennent aussi la forme d’une absence de volonté ou de désir — c’est pourquoi le terme de conditions est sans doute préférable. Cet « impossible de contrainte », on gagnerait, me semble‑t‑il, à le penser en termes d’inadéquation ou plutôt d’adéquation à des conditions (artistiques, esthétiques, économiques, juridiques, politiques, morales, religieuses, techniques, corporelles… : elles sont dès lors des conditions de possibilité et d’intérêt)60.

282. « D’un autre côté, il y aurait l’impossible par mimétisme, l’impossible d’ordre expressif ou référentiel61. » Sont citées les « constellations‑légumes » du Château des cœurs de Flaubert ou encore, dans Les Derniers Jours de l’humanité de Kraus, le monologue du Râleur qui notamment par sa longueur relève d’une « forme dramatique monstrueuse » censée « manifester la disharmonie fondamentale de l’univers […] et lutter contre la théâtralisation du monde par les médias62 ». HamletMachine, « pièce impossible » de Müller, exemplifierait également cet impossible, dans la mesure où

tout dialogue s’y avère radicalement empêché et détruit, en raison de l’insoutenable violence de l’Histoire ; deux pétrifications se répondent, celle de l’Histoire (sans plus de progrès ni de sens) et celle du théâtre (sans plus de progression dramatique, immobilisé, voué au surplace)63.

29« L’impossible par mimétisme » se révèle donc excessivement vaste et divers. Il faut lire H. Kuntz pour comprendre que « l’écriture de l’histoire est, chez Müller, indissociable d’un questionnement de la possibilité même de la pièce de théâtre64 » :

En interrogeant conjointement la possibilité d’un progrès historique et celle d’une progression dramatique, Müller suggère que c’est l’immobilité de l’histoire qui rend le théâtre impossible65.

30L’impossible est dès lors ici, si je comprends bien, en effet d’ordre mimétique : il est référentiel (l’histoire) et expressif (son écriture). Mais en tant qu’il flirte avec l’indicible, l’inmontrable, l’infigurable66, cet impossible dépasse largement le théâtre et ses conditions : il concernerait presque l’art en général dans sa capacité à représenter — et en ce sens on comprend combien cet impossible peut intéresser en général les artistes et les critiques.

313. « Enfin, un impossible essentiel (ou métathéâtral ?) se manifeste lorsqu’une pièce entre en contradiction avec certaines données constitutives du théâtre. Difficile bien sûr d’en établir la liste. » Les exemples donnés sont : La Dernière Bande (1958) de Beckett qui « min[e] le dialogue et […] refus[e] l’unité de la situation énonciative », Le Portrait de Dora (1976) d’Hélène Cixous qui invente la didascalie interrogatrice « qui ne décide pas du destinataire auquel une réplique doit s’adresser ». Ces deux pièces « donc touchent aux conditions mêmes du fonctionnement de la parole théâtrale ». Reste pourtant à voir si celle-ci existe sous la forme de « donnée constitutive du théâtre » : « La Dernière Bande », écrit Nathalie Fournier, « un impossible théâtre ? impossible, oui puisque le texte dénie a priori tout ce qui fait le théâtre, c’est‑à‑dire le dialogue […], mais théâtre indubitablement67 ». J.‑F. Louette distingue ensuite, « à côté du principe de divertissement, […] le principe de visibilité (le théâtre montre) ». Y contreviennent Villiers de l’Isle-Adam qui avec Axël « vis[e] des valeurs qui ne s’incarnent qu’au prix de leur déchéance », « Sarraute, en répugnant, par refus de réalisme, à montrer des corps et à mettre en espace les “tropismes” […], en recherchant une mise en scène mentale », « Adamov […], en voulant faire parler des instances psychiques (comment les figurer sans les déformer en types ?) », « ou enfin Valère Novarina, quand il redéfinit l’acteur non plus comme une tension vers l’imaginaire, mais comme un corps qui se laisse en son centre trouer par la parole afin de découvrir l’abîme du réel68 » : ainsi ils « mettent le pas sur le seuil de l’impossible69. » La liste se termine par un retour à Beckett : « en prenant, dès Godot ou Fin de partie, le risque de l’ennui […], n’affronte‑t‑il pas délibérément un autre impossible — qui ira jamais au théâtre pour s’ennuyer ?70 ». Remarquons déjà que c’est parfois parce que certaines choses sont inmontrables qu’elles intéressent le théâtre71, même si elles sont par là susceptibles de contrevenir au « principe de visibilité ». C’est le cas aussi de l’impossible par « ennui » (qui contreviendrait au « principe de divertissement ») qui, de fait, a intéressé un certain théâtre et même un certain public. « L’impossible essentiel » est peut‑être, des « trois visages de l’impossible », celui qui est le plus difficile à conceptualiser.

Histoire de l’impossible théâtral

32Fait bien sûr obstacle à la classification des impossibles proposée par J.‑F. Louette le caractère indissociable des deux dernières catégories (l’impossible « par mimétisme » et « essentiel ») d’avec une réflexion sur les conditions du théâtre (l’impossible « de contrainte »), conditions qui déterminent en effet — techniquement, culturellement, … — « le » théâtre dans sa capacité à représenter et à imposer son « essence ».

33Reprenons l’exemple de la « constellation‑légumes » du Château des cœurs de Flaubert, donné par J.‑F. Louette pour illustrer l’impossible « par mimétisme ». Selon B. Vibert, une première dimension « impossible » de cette pièce serait le type particulier de comique, à de nombreux égards inadéquat, déployé par son auteur72. Une autre aurait trait aux « possibilités » offertes par la scène de théâtre. B. Vibert retranscrit une didascalie qu’il commente ensuite ainsi :

Aussitôt le pot‑au‑feu, dont les anses se transforment en deux ailes, monte dans les airs et, arrivé en haut, il se retourne entièrement. Tandis que les flancs du pot‑au‑feu vont s’élargissant toujours, de manière à couvrir la cité endormie, des légumes lumineux, carottes, navets, poireaux, s’échappent de sa cavité et restent suspendus à la voûte noire des constellations73.
[…]
La fantaisie tout à la fois comique et poétique passe dans le langage qui donne déjà à voir le tableau. Mais on comprend en même temps qu’une telle scène atteint la limite du représentable. Car quels décors et quelles machineries pourraient rivaliser avec le burlesque d’une semblable évocation placée sous le ciel de « constellations‑légumes » ?74

34En fin d’article, B. Vibert interroge : « Faut‑il porter Le Château des cœurs à la scène ? En tout état de cause, l’expérience vaudrait d’être tentée, et on demande à voir75. » La chose nous paraît en effet aujourd’hui loin d’être infaisable — car enfin cette « constellation‑légumes » peut se réaliser grâce à des solutions techniques nouvelles (vidéo, hologramme, etc.) ou plus traditionnelles (lanternes magiques, marionnettes, etc.). Par ailleurs, la « constellation‑légumes » n’existant que dans un monde merveilleux, il faut se demander dans quelle mesure les spectateurs (d’aujourd’hui et d’antan) exigent de sa « représentation » qu’elle soit hyperréaliste : le « mal fait », par convention, fait souvent l’affaire. C’est que la « limite du représentable » atteinte par la « constellation‑légumes » a été dépassée par le théâtre : de ce point de vue, cet impossible est possible (et peut‑être même depuis fort longtemps). La question du « représentable » chez Flaubert (pareillement au sujet de Müller76) amène in fine à interroger les conditions du théâtre (notamment techniques, mais aussi artistiques et esthétiques).

35L’impossible théâtre de Flaubert sur le plan mimétique rapproche en fait aussi d’une réflexion sur « l’impossible essentiel », c’est‑à‑dire sur un hypothétique théâtre impossible. B. Vibert postpose d’ailleurs l’adjectif en début d’article : « De fait, Le Château des cœurs est bel et bien une pièce de théâtre impossible en son temps, et qui semble le rester encore de nos jours77. » C’est que B. Vibert doit se faire l’écho, dans la réception de la féérie de Flaubert, des interrogations au sujet de « l’opposition entre le littéraire et le théâtral qui est au cœur du débat, comme si le possible théâtral était nécessairement à proportion inverse du possible littéraire78. » Par bien des égards, « l’impossible par mimétisme » ici considéré se rapproche dès lors également de la troisième catégorie isolée par J.‑F. Louette en tant qu’elle a trait aux « possibilités offertes par le théâtre79 », pour reprendre les mot d’H. Kuntz, considéré comme un art essentiellement distinct des autres (et surtout de la littérature). Mais l’on voit que la question du « possible essentiel » impose également d’interroger les conditions qui manifestent cette « essence » du théâtre. Il y aurait bien — peut-être —, et c’est là ce que peut révéler par exemple l’étude du théâtre « fantastique » (selon notre définition contemporaine80), certains effets que le théâtre comme art scénique tel qu’on le connaît ne permettrait pas bien de réaliser : notamment les effets de focalisation interne. Peut-être, car il y a fort à parier que cet « impossible », qu’on pourrait dans la précipitation qualifier d’« essentiel », soit le fait d’une myopie. De fait le monodrame, qui mobilise volontiers des effets de focalisation interne difficiles dans des conditions ordinaires (hors les scènes à un personnage) mais jusqu’à preuve du contraire possibles, est une forme investie à la fois par l’opéra et par le théâtre81.

36Se repose en fait sans cesse la question des définitions, à la fois de l’impossible et du théâtral : double gêne. L’« impossible par mimétisme » dépend non seulement d’un état de la technique, mais plus encore peut-être des exigences (habitudes, attentes, désirs…) des artistes et des spectateurs au sujet de la « représentation » — bref des conditions du théâtre. Par ailleurs, comment définir l’essence d’un art qui serait « le théâtre » ? Malgré les recherches menées depuis de nombreuses années dans ce domaine, elle reste insaisissable. Les « limites du théâtre », pour reprendre un terme souvent utilisé dans le volume82, sont repoussées à peine sont‑elles dessinées. On conviendra dès lors que l’« impossible essentiel » dépend non pas tant d’une essence que de l’état du théâtre à certains « moments donnés » — c’est‑à‑dire, on y revient, qu’il relève lui aussi des conditions du théâtre. Les « données constitutives » du théâtre sont elles-mêmes historicisables : c’est pourquoi, comme le dit J.-F. Louette, il est « difficile […] d’en établir la liste ».

Impossible, vraiment ?

37Il faut relever que les auteurs du xixe siècle ont eux‑mêmes utilisé le terme (parmi une pléiade de synonymes) qui n’est dès lors pas une création des chercheurs : C. Lacoste mentionne le célèbre chapitre xi de Mademoiselle de Maupin (1835) vantant le « théâtre fantasque, extravagant, impossible83 » et Ph. Andrès le Théâtre impossible (1861) d’Edmond About84. Dans quelles conditions cette notion revêt‑elle toutefois une pertinence ? Car le terme « impossible » pouvait logiquement qualifier ce qui relevait de la catégorie de « l’impossible essentiel ». Mais celle-ci étant invalidée, l’essence étant relativisée, le terme « impossible » semble bien perdre tout appui. Ne faut‑il pas le réserver à des cas où une représentation théâtrale est interdite en effet, et empêchée ?

38Si, malgré tout, l’on tient toutefois au terme « impossible », peut‑être pourrait‑on distinguer entre les « impossibles théâtres » et les « théâtres impossibles » — différence thématisée par certains contributeurs. La place de l’adjectif en français peut faire sens (sur le modèle du rude chasseur et du chasseur rude85) : qu’il y ait des impossibles théâtres, intéressants et séduisants, qu’ils informent dès lors ce qui est théâtralisé, soient même rendus possibles ailleurs ou ultérieurement, voire théâtralisés, au moins sous la forme de tentatives, c’est un fait : ce sont, à des niveaux différents, les « impossibles de contrainte » et les « impossibles par mimétisme ». Il en va autrement des théâtres impossibles (l’« impossible essentiel »), qui par postposition de l’adjectif résisteraient absolument (synchroniquement et diachroniquement) à toute forme de théâtralisation. La simple imprévisibilité du monde futur, de son théâtre et de ce que nous déciderons de reconnaître alors sous cette étiquette devrait nous empêcher de croire en leur existence. Doit‑on dès lors conclure aux possibles impossibles théâtres mais aux impossibles théâtres impossibles ? À moins que la valse avant‑arrière de l’adjectif ne soit simplement un leurre ? Dans le doute, l’italique a disparu du titre du présent article : on pourra ainsi le lire comme on veut — on pardonnera cette pirouette.

39Dans tous les cas, on achoppe sur les définitions du théâtre, sur « ce qui fait théâtre » ou, plus compliqué encore (mais induit par la question du « possible »), sur ce qui « peut faire théâtre » dans un texte ou dans un théâtre. Sur Axël, la critique « a depuis un siècle largement souligné l’abondance des éléments qui, dans ce drame, “ne faisaient pas théâtre”, voire s’opposaient au genre86. » À propos des représentations de Mouchoir de nuages de Tristan Tzara, J. Bernard déclare simplement : « En conclusion, je ne sais pas si tout cela fait théâtre et je conçois qu’un public s’y soit agacé87. » En conclusion, je ne sais pas non plus si cet impossible théâtre fait théâtre, ou si l’impossible est possible, ni d’ailleurs s’il faut poser la question des conditions du théâtre en ces termes — mais sans agacement aucun, car il faut bien avouer qu’Impossibles théâtres xixe-xxe siècles, en raison même de son foisonnement, permet des croisements fructueux. Il est, au sens le plus fort du terme, stimulant.


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40Bien loin d’ailleurs d’être une maladresse, l’emploi du terme « impossible » est revendiqué par J.-F. Louette, qui cite L’Impossible (1962) de Bataille dont il « extrai[t] trois propositions » :

[1.] L’impossible est ce à quoi nous n’accédons qu’en acceptant la disparition de l’utile, du réel, de la science. L’impossible se situe du côté du plaisir violent, de l’horreur et de la mort. De même le théâtre : « seul ce qui est insoutenable, écrivait Ionesco dans Notes et contre-notes, est profondément tragique, profondément comique, essentiellement théâtre ».
[2.] L’impossible […] met en jeu la communauté, c’est-à-dire « la suppression de l’être séparé que nous sommes ». […] Qui ne voit que c’est aussi l’enjeu du théâtre ?
[3.] Enfin : « l’impossible, c’est la littérature », ou du moins « on ne saisit pas le sens de la littérature sans l’apercevoir ». Et pas non plus, sans doute, le sens du théâtre.

41Que faire de ces propositions, au juste ? Elles sont, selon les mots de J.‑F. Louette, « plus ou moins énigmatiques, mais […] donnent à penser » :

Notre souhait, on s’en doute, est simple : que les réflexions recueillies ici, sans ennuyer, montrent que l’aventure théâtrale n’est jamais plus fructueuse que lorsqu’elle explore ses propres limites, celles de l’illisible et de l’irreprésentable — lorsqu’elle brûle à sa propre rampe88.

42On peut dire que ce souhait, dans le cas présent, a été exaucé.