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Culture(s) populaire(s) et pratiques culturelles. Miroirs et mirages du bonheur (Strasbourg)

Culture(s) populaire(s) et pratiques culturelles. Miroirs et mirages du bonheur (Strasbourg)

Publié le par Marc Escola (Source : Danièle André/Elodie Chazalon)

CONGRÈS AFEA (Association Française d'Études Américaines), Université de Strasbourg, 6-9 juin 2017

ATELIER "CULTURE(S) POPULAIRE(S) ET PRATIQUES CULTURELLES" :

MIROIRS ET MIRAGES DU BONHEUR

L’expression « la recherche du bonheur » a longtemps signifié aspirer à une vie meilleure et était liée à un rêve américain que chacun pouvait prétendument atteindre, mais ce rêve semble pour beaucoup inatteignable. La culture populaire nord-américaine rend visible aussi bien la dichotomie entre la réalité et l’idéal que la fluctuation du terme « bonheur », dont le sens varie selon les sociétés et les périodes. Doit-on repenser le bonheur ? Si oui, en quels termes ?

L’utilisation de l’expression « la recherche du bonheur », comme titre de maintes productions culturelles et comme enjeu commercial, montre que si cette notion est un droit inaliénable qui fait partie de l’héritage nord-américain et de ses valeurs, elle est aussi  insaisissable et trompeuse. La société nord-américaine est fondée sur une économie capitaliste dont l’un des mécanismes consiste à persuader les individus qu’ils doivent toujours se procurer/acheter quelque chose afin d’être parfaitement heureux. La culture populaire pousse à repenser le sens de ce que sont et impliquent le bonheur et sa recherche.                                         La science-fiction et des œuvres précurseurs nous ont montré qu’une société qui veut être l’image du bonheur et qui tient à ce que tous ses citoyens soient heureux ne peut y parvenir qu’en imposant sa vision du bonheur, en contraignant les individus à être heureux ou en leur faisant croire qu’ils le sont. Cela nécessite que soient imposées aux citoyens des normes de vie et de pensée ; ils doivent alors renoncer, volontairement ou non, consciemment ou non, à un autre grand idéal américain : la liberté individuelle.

Les pratiques culturelles, et notamment la culture du leisure – proche du culte et si chère à la nation nord-américaine – reflètent également le paradoxe inhérent aux sociétés de consommation et aux « modes » de vie qu’elles promeuvent. Tout comme la tendance (« trend ») ou le « courant », la mode est à la fois la promesse d’une forme de bonheur et l’annonce de sa fugacité. Analysée par Georg Simmel dans son essai Philosophie de la mode (Der Mode, 1905), la mode – en tant que phénomène – est un mouvement perpétuel de satisfaction/insatisfaction des désirs, de plein et de vide, car elle promet de satisfaire les besoins contradictoires d’imitation et de différentiation sans jamais que ces deux aspects soient finalement comblés.  

Les industries culturelles se sont approprié cette dualité inhérente à l’humain si bien que les productions (romans, films, séries TV, bandes dessinées, etc.) et les pratiques culturelles se sont progressivement greffées aux « mythes fondateurs de la nation américaine » (Marienstras) et aux valeurs qui leurs sont afférentes (American dream, self-made man, Gold Rush, pays de Cocagne et Pastorale – individualisme, compétitivité, liberté, libre entreprise, abondance et ascension sociale etc.).

 On pourra se demander si la recherche du bonheur n’est finalement pas une « expérimentation » qui passerait par des pratiques et des comportements de plus en plus excessifs, que ce soit dans le moins ou la surenchère. Le végétalisme et les régimes alimentaires « sans », les cosmétiques « nude », le dépouillement d’un style de vie prétendu « bohême », alternatif et hors des circuits de production et de consommation de masse ou au contraire, la consommation ostentatoire et l’hyperconsommation sont des pratiques de l’excès qui donnent aussi le sentiment que la possession ou son apparent opposé, le détachement, procurent le bonheur. La culture populaire et les pratiques culturelles montrent combien ces équivalences sont en train de se modifier, et que le bonheur n’est plus à chercher dans la richesse et l’accumulation, ni même dans le dépouillement.                                       

Si la question d’un retour à des valeurs autres que financières et consuméristes se pose, aspects que la culture populaire transpose, il serait pertinent de savoir si ces mouvements vers d’autres valeurs ne deviennent pas eux-mêmes des tendances et valeurs marchandes qui poussent alors vers une autre uniformisation des désirs et besoins.

Les pistes suivantes, non exhaustives, pourront être explorées : 

-les œuvres qui parlent de la « recherche du bonheur » et celles qui proposent des alternatives ou visions critiques

-les œuvres qui questionnent la « culture populaire » et la « culture de masse » comme juges et parties dans l’association entre « bonheur » et « bien » de consommation

-les industries culturelles et les produits culturels comme remèdes au manque et producteurs de désirs

-les pratiques culturelles (modes vestimentaires et alimentaires, sports, jeux (de rôle, vidéo, etc.), rituels corporels, modes de vie) dans leur double mouvement d’imitation/différentiation, satisfaction/insatisfaction des désirs

-la représentation du « désir », du « manque » et de l’ « excès » dans la culture populaire

-l’articulation entre la recherche du bonheur et les notions ci-dessus

 

Les analyses pourront se concentrer non seulement sur les aspects théoriques, mais aussi sur l’interprétation et l’appropriation de pratiques ainsi que sur la relecture populaire des pratiques et productions de la culture dominante. Les propositions, entre 300 et 500 mots, et une courte biographie sont à envoyer pour le 12 janvier  conjointement à Danièle André, daniele.andre.univ.larochelle@gmail.com et Elodie Chazalon, elodie.chazalon@univ-lr.fr    

NB: Il nous faut prévenir que pour participer au Congrès de l'AFEA et donc à notre atelier, les communiquants doivent s'inscrire à l'AFEA (62 ou 57 euros selon le statut) et au Congrès (entre 30 et 50 euros selon les années).