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Colloque : "Du « roman à quatre sous » aux mangas. Retour historique sur le phénomène amoureux dans les « mauvais genres » de la littérature" (Bruxelles)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Laura Di Spurio)

Du « roman à quatre sous » aux mangas.

Retour historique sur le phénomène amoureux dans les « mauvais genres » de la littérature

Université libre de Bruxelles – 21 et 22 novembre 2019

 

Érigé en valeur, l’amour est devenu au cours du 20e siècle un idéal, un lieu d’épanouissement individuel et surtout une obsession de la culture de masse. Le rôle des médias – presse, littérature ou encore cinéma – est en effet central dans la promotion de l’amour : du mariage d’amour à la disqualification du sentiment amoureux au BDSM, ces médias ont ainsi participé aux transformations du phénomène amoureux au 20e siècle.

Depuis une vingtaine d’années, l’amour et la sexualité sont aussi devenus des objets d’études légitimes dans les universités, les « mauvais genres » de la littérature aussi. Les histoires d’amour ont ainsi  été analysées sous toutes leurs formes, tant leur support que leurs lectrices ont fait l’objet d’études fouillées. Depuis 2010, le Journal of Popular Romance Studies se consacre, par exemple, exclusivement à l’étude du roman sentimental. Si la littérature sentimentale est entrée discrètement à l’université, elle a toujours mauvaise presse bien qu’elle demeure l’un des genres littéraires les plus prisés sur le marché. Hier incarnée par les Confidences, aujourd’hui par les Cinquante nuances de gris, cette littérature reste associée à un lectorat féminin.

Le phénomène amoureux semble être présent dans tous les genres ou presque. N’est-il pas finalement l’un des motifs centraux de toute narration ?  Il demeure que l’étude des discours et des représentations du phénomène amoureux est encore aujourd’hui associée aux femmes, aux romans d’amour ou encore à la presse féminine. Les « mauvais genres » de la littérature sont aussi assignés à un genre en particulier –  le roman d’amour au féminin, la bande dessinée au masculin – quand d’autres sont associés à un âge en particulier – l’adolescence, par exemple. Les noms mêmes donnés à certains courants – mommy porn, chick lit – trahissent une dévaluation de cette littérature qui ne cesse pourtant d’attirer en masse lectrices et lecteurs.

Ce colloque a pour but d’analyser historiquement les représentations du phénomène amoureux dans les « mauvais genres » de la littérature : leurs transformations, leur stabilité, les retours en grâce de certains thèmes – le mariage, par exemple – ou leur apparition. Notre objectif est d’analyser ces mauvais genres tant dans leur dimension de genre et de sexualité que dans celle de la classe mais aussi de la race – thématique encore trop peu abordée dans les études passées. Cette rencontre sera par ailleurs l’occasion d’établir une synthèse des recherches sur le thème, mais aussi d’aller au-delà des sentiers battus du roman sentimental pour détecter la présence ou l’absence de l’amour dans certains genres littéraires pour en analyser la portée.

Les axes :

  • Le roman sentimental comme genre littéraire

À travers cet axe, nous nous intéresserons plus particulièrement aux évolutions et aux permanences de la définition de ce genre littéraire. Qu’est-ce qu’un roman sentimental ? Quels sont les critères de classement ? Ont-ils évolué ? Quelles sont les frontières entre le roman d’amour, le roman érotique et la pornographie ? Et comment ces frontières ont-elles été brouillées et déplacées au cours du 20e siècle ?

  • Les supports des histoires d’amour

Cet axe s’intéressera plus particulièrement à l’histoire matérielle du roman d’amour. Des magazines qui ont mis à l’honneur les romans d’amour en feuilleton aux romans photos, comment ont évolué les supports du roman sentimental ?

  • Les mises en scène du désir amoureux et sexuel dans leur dimension de classe, de race, de genre et de sexualité

Le roman d’amour répond à des codes très précis en termes de représentation de genre et de sexualité. À travers ce colloque, nous chercherons à analyser leur adéquation et/ou transgression aux normes de genre et de sexualité à différentes époques. Nous tenterons d’interroger les représentations de la « transgression » au sein de ces narrations. Comment le désir homosexuel tant féminin que masculin apparaît-il dans ce genre littéraire ? Comment a-t-on décrit les relations interraciales dans ce genre littéraire ?

  • Les stratégie éditoriales et marketing des maisons de presse et d’édition

Comment vend-on l’amour ?

L’amour se présente comme une valeur naturelle et dès lors transcendant les cultures. Comment la romance s’exporte-t-elle ? Quelles sont les stratégies de distribution et de traduction du roman sentimental à l’échelle internationale ? Et comment s’écrit l’amour sur les autres continents ?

  • La réception, en termes de critiques, censure et analyses sociologiques et psychologiques des lecteurs et des lectrices

On connaît les discours des entrepreneurs de morale sur les mauvais genres de la littérature ou encore la réception des critiques littéraires à l’égard de ces genres, beaucoup moins ceux des sciences sociales et humaines. Quand les mauvais genres sont-ils devenus des objets d’études ? Comment ont-ils été étudiés et analysés ? Quelles furent les critiques auxquelles ils ont été soumis ?

Éléments de bibliographie

Michael Bronski, Pulp Friction. Uncovering the Golden Age of Gay Male Pulps, New York, St. Martin’s Griffin, 2013.

Ellen Constans, Parlez-moi d’amour : le roman sentimental des romans grecs aux éditions de l’an 2000, Limoges, PULIM, 1999.

Niamh Cullen, « Changing Emotional Landscapes? Grand Hotel and Representations of Love and Courtship in 1950s Italy », Cultural and Social History, 2014, 11/2, p. 285-306.

Jamil Dakhlia et Géraldine Poels, « Amour toujours », Le Temps des Médias, 2012/2, n°19.

Bridget Fowler, The Alienated Reader: Women and Popular Romantic Literature in the Twetieth Century, Hertfordshire, 1991.

Sylvette Giet, Nous Deux : Apprendre la langue du cœur (1947-1997), Leuven, Peeters, 1997.

Annick Houel, Le roman d’amour et sa lectrice. Une si longue passion. L’exemple Harlequin, Paris, L’Harmattant, 1997.

Diana Holmes, Romance and Readership in Twentieth Century France: Love Stories, Oxford, Oxford University Press, 2006.

Pierre Lepape, Une histoire des romans d’amour, Paris, Seuil, 2011.

Kamblé Jayashree, Making Meaning in Popular Romance Fiction: An Epistemology, New York : Palgrave MacMillan, 2014.

Ken Gelder, Popular Fiction: The Logics and Practices of a Literary Field, Londres/New York, Routledge, 2004.

Lisa Fletcher, Historical Romance Fiction. Heterosexuality and Peformativity, Londres/New York, Routledge, 2016.

Janice Radway, Reading the Romance: Women, Patriarchy, and Popular Literature, University of North Carolina Press, 2009 (1984).

Pamela Regis, A Natural History of the Romance Novel, Philadelphia, University of Pennsylvania Press, 2003.

Séverine Olivier, « Quand les bons sentiments font “mauvais genres” : les romans sentimentaux des romans pour “adulescents” », dans Laurent Bazin et al., Esthétiques de la distinction : gender et mauvais genres en littérature de jeunesse, Francfort, Peter Lang, 2013, p. 209-224.

Bruno Péquignot, La relation amoureuse : analyse sociologique du roman sentimental moderne, Paris, L’Harmattan, 1991.

Dana Percec (ed.), Romance: The History of a Genre, Cambridge, Cambridge Scholars Publishing, 2012.

 

Les propositions, de 2000 signes maximum, doivent être envoyées, pour le 30 mars 2019 à Laura Di Spurio (ldispuri@ulb.ac.be). Elles doivent être accompagnées d’un cv. 

 

Comité scientifique :

Laura Di Spurio (CIERL – Université libre de Bruxelles)

Clara Lévy (Institut d’Études européennes – Paris 8)

Marie-Pier Luneau (GRÉLQ – Université de Sherbrooke)

Cécile Vanderpelen (CIERL – Université libre de Bruxelles)

Jean-Philippe Warren (Chair for the Study of Quebec – Concordia University)