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Les approches matérialistes du réalisme (ENS & Paris 8)

Les approches matérialistes du réalisme (ENS & Paris 8)

Publié le par Marc Escola (Source : Laélia Véron)

Le séminaire SLAC (Séminaire de Lettres des Armes de la Critique, ÉNS Ulm) organise, pour sa 5ème année d’existence, une journée d’études sur les approches matérialistes du réalisme, qui aura lieu le 5 juin à l’université de Paris 8, avec le soutien du laboratoire LHE (Littérature, Histoire, Esthétique), 217322.

La notion de réalisme, souvent convoquée dans les études littéraires, pose problème : d’une part, son pouvoir d’évidence tend à naturaliser certains traits thématiques et stylistiques au détriment d’une contextualisation historique fine ; d’autre part, son intérêt heuristique peut être fortement limité par l’élargissement de son domaine d’application. Si la plupart des critiques l'assimilent surtout à son apogée, au XIXe siècle, d'autres l'étendent jusqu'au XXe[1], voire jusqu’aux nouvelles formes de la littérature contemporaine[2]. Peut-on discerner des traits communs entre le « réalisme » tel qu’il est canoniquement conçu – à savoir un moment historiquement et géographiquement circonscrit, ce « réalisme français » défini par Lukács et incarné selon lui par Balzac, et ces courants qu’on a pu appeler « nouveau réalisme » ou « réalisme contemporain » ?

Nous souhaitons ainsi aborder à nouveau cette notion de réalisme et interroger la continuité et la cohérence de ces appellations selon un angle méthodologique spécifique, l’approche matérialiste. Nous entendons par là non seulement une attention portée au contexte de production et de réception et à l’inscription et au rôle des œuvres dans le mouvement de l’histoire, mais aussi aux théoriciens qui se revendiquent de l’approche matérialiste (notamment Lukács et ses successeurs, Goldmann, Barbéris, etc.) et se nourrissent des apports du marxisme et des sciences sociales en général. Pour plus de détails sur l’approche du séminaire, on pourra se rapporter aux séances mises en ligne sur le site du SLAC : https://adlc.hypotheses.org/seminaire-litteraire-des-armes-de-la-critique-4e-annee-2016-2017

Les communications pourront s’inscrire dans les axes suivants :

  • La spécificité de la définition matérialiste du réalisme. On pourra revenir sur la définition du réalisme telle qu’elle a notamment été exposée par Lukács (dans Balzac et le réalisme français, La Découverte, [1934-1935/1935] 1999) et la comparer avec d’autres définitions. On essaiera ainsi de mettre en valeur la particularité de la définition matérialiste.
  • L’étude théorique et historique de la construction d’une approche matérialiste du réalisme. On pourra ainsi s’interroger sur le rôle de la critique littéraire russe (Biélinsky, Tchernychevski) dans l’appropriation matérialiste du réalisme ; sur le positionnement de Lukács vis-à-vis de cette critique ; sur les rapports historiques entre le réalisme socialiste de Lounatcharski et le réalisme tel qu’il est défini par Lukács.
  • En s’appuyant ou non sur cette contextualisation historique, on pourra s’interroger sur l’ambiguïté pragmatique de l’étiquette « réalisme », entre critique littéraire descriptive d’auteurs passés et ambition programmatique qui cherche à politiser la littérature. On pourra se demander si cette ambiguïté et/ou cette ambition politique est toujours présente dans les « nouveaux réalismes ».
  • La reprise et la critique des analyses matérialistes réalistes canoniques (Lukács, Goldmann, Ian Watt, Fredric Jameson). On pourra revenir aussi bien sur les auteurs étudiés par les textes matérialistes canoniques (par exemple l’opposition entre Balzac et Zola) que sur les outils méthodologiques fournis par ces mêmes textes (par exemple l’opposition entre tendances et moyennes). Ces études et ces outils peuvent-ils être affinés, critiqués ?
  • Le modèle de l’analyse matérialiste du réalisme est-il applicable à d’autres corpus ? On pourra tenter d’étendre ces mêmes analyses (conceptuelles, formelles) et ces mêmes outils à d’autres corpus, en ne se limitant ni à la littérature française, ni au xixe siècle.
  • Cette question du corpus pourra également être interrogée plus spécifiquement, d’un point de vue méthodologique. En effet, les approches matérialistes du réalisme ne s’appuient paradoxalement que sur quelques auteurs, ce qui relève plutôt d’une idéologie romantique du génie et d’une méthodologie individualiste légitimiste. On essaiera donc d’interroger le réalisme en prenant comme illustrations des genres dits mineurs, voire des productions littéraires collectives.

 

Les propositions de communication (une demi-page) doivent être envoyées, accompagnées d’une brève notice bio-bliographique, à realisme2018@gmail.com avant le 28 février 2018. Il n’est pas nécessaire d’avoir un ancrage universitaire pour participer à cette journée d’études. En revanche, nous insistons sur la nécessité de ne postuler que si l’aspect matérialiste de la problématique est nettement pris en compte.

 

[1] Voir notamment Ph. Dufour, Le réalisme, PUF, 1998, qui parle d’un réalisme « de Balzac à Proust ».

[2] Voir L. Ruffel, « Un réalisme contemporain : les narrations documentaires », Littératures, n°166, 2012.