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L'océan et les mers (Toronto)

L'océan et les mers (Toronto)

« Où sont vos monuments, vos batailles, martyrs ? Où est votre mémoire tribale ? Messieurs, dans ce gris coffre-fort. La mer. La mer les a enfermés. La mer est l’Histoire. » – Derek Walcott, « The Sea is History »

 

Appel à communications

28e conférence annuelle du Centre de littérature comparée de l’Université de Toronto

L’océan et les mers

Comment le vent du large fait-il lever les voiles de l’imagination ? En littérature, de Homère jusqu’à Walcott en passant par Melville, l’océan et les mers ont inspiré la folie et l’horreur, mais aussi l’affiliation et la solidarité. Les eaux du monde sont des sites de culture et de labeur. L’accès à l’océan, qui permet le contact entre les peuples à des fins de voyage, de commerce, de guerre ou de colonisation, a toujours été une question de pouvoir. La navigation sur les océans et les mers est centrale au développement matériel du monde moderne.

Dans « Submarine Futures of the Anthropocene » (2017), Elizabeth DeLoughrey suggère que nous nous tournions désormais vers l’océan pour alimenter nos imaginaires, considérant que le niveau des océans monte en raison du réchauffement climatique, et que les rapports multi-espèces et multi-entités qu’entretiennent les humains avec le reste du monde dépendent du mouvement des marées. Dans Our Mother Ocean (2014), Mariarosa Dalla Costa et Monica Chilese retracent les effets de la mondialisation de l’industrie des pêches dans les pays du « Sud global » et constatent notre échec collectif pour ce qui est de protéger les océans ainsi que ceux et celles dont la survie en dépend. Elles font appel à l’océan pour illustrer la solidarité et les luttes populaires qui s’organisent pour résister aux forces capitalistes globales. Enfin, dans Eating the Ocean (2016), Elsepth Probyn, en explorant la consommation durable, les implications politiques de la pêche commerciale, ainsi que la relation entre les êtres humains et les poissons, concède de l’agentivité non seulement aux acteurs humains, mais également à l’océan.

L’océan est aussi une source de savoir. Pour les Grecs et les Romains de l’Antiquité, la mer et le littoral symbolisaient la limite du monde, jusqu’à ce que de nouvelles formes de navigation leur permettent d’explorer d’autres contrées au-delà des côtes. Les héros de Homère s’aventuraient sur les mers insondables à la recherche de ressources et de territoires à acquérir, certes, mais aussi en quête de connaissances et de sagesse. Aujourd’hui, en « prenant nos distances des perspectives traditionnelles fondées sur le concept de nation ou reposant sur la terre ferme, » suggère Hester Blum, « sans doute trouverons-nous de nouveaux espaces critiques nous permettant de voir d’un nouvel œil les questions d’affiliation, de citoyenneté, d’échange économique, de mobilité, des droits, et de souveraineté. »[1] C’est en ce sens que le Centre de littérature comparée de l’Université de Toronto vous demande : lorsque notre esprit critique prend la mer et s’éloigne des méthodologies nationalistes, quelles formes peuvent bien prendre nos représentations esthétiques et théoriques de l’océan et des mers ?

Nous sollicitons les propositions de communications individuelles ou en groupe, de performances, d’art visuel, de poésie, de spoken word et de films qui imaginent, conçoivent ou analysent l’océan et les mers sans tomber dans les pièges de la nationalité, des frontières et de la conquête territoriale. Nous sollicitons également les propositions d’ateliers d’écriture, de panels et de tables rondes (pour ces deux derniers formats, nous demandons aux participants de soumettre leurs propositions conjointement).

Parmi les thèmes et les sujets possibles, mentionnons :

– La consommation de l’océan, la pêche commerciale et les pratiques durables

– La migration, les réfugiés, le droit à la mobilité, la relocalisation, les diasporas

– Le contact entre les langues, le métissage, la créolisation, la traduction

– Les récits de voyage et les écrits suivant la colonisation

– Les représentations littéraires de l’océan, la poétique de la mer

– L’échange et le commerce, la traite des esclaves transatlantique

– Les pipelines et les marées noires, l’accès à l’eau salubre, l’éco-militantisme

– Les îles, le tourisme, l’exploitation capitaliste

– Les analyses phénoménologiques de l’océan

– Les sirènes, les monstres marins et la mythologie marine

– Les récits autochtones de la création, le rôle de l’océan dans la pensée autochtone

– L’océan et le genre, l’amour queer et les étendues d’eau

– L’agentivité de l’océan, le concept de « geontopower », le caractère sacré de l’eau

– L’exploration et la colonisation, le racisme et les frontières de la mer

– Les ouragans, les tsunamis, les catastrophes naturelles et les changements climatiques

– Les pirates, le marronnage, les collectivités extralégales, le matelotage

Nous sollicitons les propositions d’au plus 250 mots. Le temps alloué pour les communications individuelles est de 15 à 20 minutes ; les panels et les tables rondes peuvent durer jusqu’à 90 minutes au total. Nous vous invitons à joindre à votre proposition un court texte biographique d’environ 50 mots. Veuillez nous envoyer votre proposition par courriel, au complitconference2018@gmail.com, d’ici le 20 octobre 2017.

Le colloque se tiendra à l’Université de Toronto les 23 et 24 février 2018. Elizabeth Povinelli, du département d’anthropologie de l’Université Columbia, sera notre conférencière invitée. D’autres détails suivront.

 

[1]Hester Blum (2013): « Introduction: oceanic studies, » Atlantic Studies, 10:2, 151-155 [notre traduction]