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Passions : le cœur a ses raisons (Tunis)

Passions : le cœur a ses raisons (Tunis)

Passions : le cœur a ses raisons

Colloque international

28, 29 et 30 novembre 2018

Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis – Université de Tunis

Laboratoire Intersignes (LR14ES01)

 

« Rien de mystérieux comme le cheminement d’une passion dans un cœur sans expérience »[1], écrit Julien Green. Oui mais voilà, Julien Green se trompe : les passions ont perdu de leur mystère car elles ont à ce jour fait l’objet de nombreuses tentatives de nomenclature et d’analyse. Les traités sur les passions sont en effet légion et ils abordent la question à travers différents domaines de l’esprit. Dans sa Biologie des passions, Jean-Didier Vincent en appelle ainsi au déterminisme biologique[2]. Julien Greimas et Jacques Fontanille interrogent les passions en tant que systèmes de signes et de significations[3]. Dans un livre consacré à la mise en discours des passions, Herman Parret invoque notamment les sciences du langage[4]. Marcus André Vieira opte quant à lui pour une approche psychanalytique de la passion amoureuse[5], là où Claudine Vidal[6] explore les passions à travers le prisme de la sociologie.

On rationalise donc volontiers les passions, on les raisonne. Descartes lui-même ne rêvait-il pas les passions par la raison[7] ? Raisonner les passions revient à reconnaître l’existence d’une ou de plusieurs systémiques régissant leur fonctionnement et/ou leurs modes de représentation. C’est à ces représentations du sentiment passionnel que s’intéresse le colloque international Passions : le cœur a ses raisons. Organisé par la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis (Université de Tunis) et par le Laboratoire de recherche Intersignes (LR14ES01), ce colloque entend interroger les passions mais aussi les systèmes de représentation et de raisonnement qu’on leur applique en littérature, en arts, dans les sciences humaines et dans les sciences du langage.

S’il est vrai que tout chercheur s’intéressant aux sentiments passionnels doit examiner le cœur humain et retranscrire les mouvements de l’âme, la chose implique aussi de s’interroger sur les limites des passions, sur leurs facteurs déclencheurs, sur leurs degrés d’intensité mais aussi sur leurs paradigmes tant il est vrai que  nos passions régissent jusqu’à nos modes d’expression. Existerait-il, à cet égard, une langue ou un langage passionnel ? Il existe du moins un déterminisme passionnel  que la rhétorique se plaît à mettre en avant en exploitant les ressorts du pathos, technique d’argumentation qui vise à persuader en émouvant le récepteur. Selon Ekkehard Eggs en effet, pour reconnaître une émotion, il existe divers registres de nature rhétorique, sémiotique et linguistique qui se traduisent dans le discours par autant d’indices observables et interprétables à partir de leurs manifestations linguistiques et sémiotiques. Ce continuum entre ces différents niveaux d’analyse rend possible la réception et l’interprétation du pathos nécessaire à la persuasion. C’est dans ce cadre qu’Eggs identifie, entre autre, les émotions comme des topoï qui connotent le potentiel argumentatif et inférentiel du « scénario prototypique » qui les représentent.

Il faut ajouter que les systèmes passionnels, qu’ils soient linguistiques, éthiques ou esthétiques sont soumis à ce qu’il convient d’appeler l’ère du temps, étant bien entendu que chaque époque conçoit les passions selon ses propres schèmes et selon les inclinaisons du moment. Pour les Anciens, les passions étaient destinées à être esthétiquement converties par la catharsis. Au XVIIe siècle, on considérait plutôt les passions comme des affections de l’âme et on les examinait selon les normes de la théologie ou de la morale entre autres ; elles étaient alors perçues comme des contre-raisons. Les Philosophes du XVIIIe siècle se sont proposé, quant à eux, de moraliser les passions en les réconciliant avec la vertu (pour les libertins, les passions sont raison). Plus tard, les passions ont été considérées à travers la psychanalyse ; pour Freud, il s’agissait de les « sublimer ». Dans un article du plus grand intérêt Pouneh Mochiri se demande même si les « passions de la rhétorique antique » ne sont pas finalement « les ancêtres des pulsions découvertes par Freud »[8]. Il est vrai que nos sociétés contemporaines ne répriment pas la dimension pulsionnelle des passions. Ces dernières ont d’ailleurs tendance à envahir les discours et les espaces dédiés à la discussion ; banalisée, la dérive passionnelle s’exprime avec violence dans les médias, en politique, en littérature, dans les arts, sur ces agoras modernes que sont les forums de discussion en ligne, autant de supports que voudrait étudier le colloque Passions : le cœur a ses raisons.

Le colloque se veut pluridisciplinaire et a pour ambition de réunir des chercheurs appartenant à différents horizons scientifiques. Les communications pourront s’élargir à l’ensemble des sciences humaines et sociales sans toutefois s’y restreindre.

Les communications, qui devront durer 25 minutes, pourront s’articuler autour des axes de recherche suivants (liste non restrictive) :

  • Écritures et thématiques des passions,
  • Passions et engagement,
  • Religions et passions,
  • Stylistique et langage des passions,
  • Rhétorique et sémiotique des passions,
  • Psychologie et psychanalyse des passions.

 

Merci d’envoyer votre proposition de communication (entre 200 et 300 mots) accompagnée d’un titre ainsi que d’une notice bio-bibliographique (précisant, entre autres, votre université, laboratoire et/ou unité de recherche de rattachement) à l’adresse suivante : colloques.intersignes@gmail.com. Délai de rigueur : 15 juin 2018. Le colloque se déroulera à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis, du 28 au 30 novembre 2018.

Le Laboratoire Intersignes et la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis n’assureront aucune prise en charge de frais de voyage ou de séjour.

 

Comité scientifique :

- Jamil CHAKER (Université de Tunis, Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis)

- Samia KASSAB-CHARFI (Université de Tunis, Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis)

- Raja BEN SLAMA (Université de Manouba, Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de Manouba)

- Raja GMIR (Université de Tunis, Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis)

- Asma GUEZMIR (Université de Tunis, Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis)

- Rim HAMZA (Université de Tunis, Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis)

- Anis NOUAÏRI (Université de Tunis, Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis)

- Faten SOMAÏ (Université de Tunis, Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis)

- Senda SOUABNI  JLIDI (Université de Tunis, Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis)

 

Calendrier :

15 juin 2018 : Deadline pour l’envoi des propositions de communications.

30 juin 2018 : Notification aux auteurs.

28, 29 et 30 novembre 2018 : Colloque international.

2019 : Publication des Actes du colloque.

 

[1] Julien Green, L’Autre Sommeil, in Œuvres complètes, Volume 4, Paris, Plon, 1954, p. 45.

[2] Jean-Didier Vincent, Biologie des passions, Paris, Odile Jacob, 1999.

[3] Algirdas Julien Greimas et Jaques Fontanille, Sémiotique des passions, Des états de choses aux états d’âme, Paris, Seuil, 1991.

[4] Herman Parret, Les Passions, Essai sur la mise en discours de la subjectivité, Bruxelles, Mardaga, 1986.

[5] Marcus André Vieira, L’Éthique de la passion, L’Affect dans la théorie psychanalytique avec Freud et Lacan, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 1998.

[6] Claudine Vidal, Sociologie des passions, Paris, Éditions Karthala, 1991.

[7] Carol Tarol-Hugon, Descartes ou les passions rêvées par la raison, Essai sur la théorie des passions de Descartes et de quelques-uns de ses contemporains, Paris, Librairie Philosophique J. Vrin, Collection « Philologie et mercure », 2002.

[8] Pouneh Mochiri, « Discours des pulsions, discours des passions », in La Pulsion et le destin, Libres cahiers pour la psychanalyse, n° 15, sous la direction de Catherine Chabert et Jean-Claude Rolland, Paris, Éditions In Press, 2007, pp. 21-28.