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Corneille et le vers
Après Corneille après Corneille, Corneille des Romantiques, Pratiques de Corneille, et Héros ou personnages ? Le personnel du théâtre de Pierre Corneille et Appropriations de Corneille, M. Dufour-Maître fait paraître directement en ligne, avec le concours de C. Laurin,, B. Louvat et L. Picciola, un nouvel ensemble intitulé Pierre Corneille, la parole et les vers, pour achever de mettre à bas ce mythe critique qui, en opposant "Corneille penseur" à "Racine poète » (lyrique), a trop longtemps occulté le travail du vers chez Corneille. Et donner tort à Claudel, qui marquait son dégoût pour "ce paquet d’alexandrins dont on [l'avait] gavé dans [s]a jeunesse", en déclarant "Non, Corneille n’est pas un poète".
La commande littéraire

"Eh oui, Monsieur, le tableau le plus célèbre du monde a été commandé par la lie de la terre avec les plus mauvaises intentions du monde, il faut nous y faire". Prononcés par le narrateur des Onze de Pierre Michon, ces mots révèlent la façon dont le phénomène de la commande embarrasse une représentation commune qui fait du projet créateur un critère cardinal de l’auctorialité moderne. Ils suggèrent aussi combien cette variété hétéronome d’occasion du livre est souvent ignorée, méprisée et, ajoutera-t-on, non moins monnaie courante. À l'initiative d'Adrien Chassain, Maud Lecacheur, Fanny Lorent et Hélène Martinelli, la 29e livraison de la revue COnTEXTES porte sur les logiques de la commande littéraire à l'époque contemporaine.
Lira bien qui lira le dernier

La Nouvelle Revue d'Esthétique consacre sa dernière livraison de l'année 2020 à celui qui a sans doute le plus œuvré au rapprochement entre la théorie littéraire et l'esthétique : Gérard Genette, en publiant les actes du colloque d'hommage tenu à l'EHESS en octobre 2019 réunis par Marc Cerisuelo. En proposant d'amples parcours de l'œuvre du théoricien, le sommaire invite à ressaisir plusieurs des problématiques forgées entre le premier volume des Figures et le deuxième tome de L'Œuvre de l'art, et à repenser les relations entre les essais théoriques et la "suite bardadraque" publiée hors collection "Poétique". Il lève aussi un coin du voile sur le fonds Raymonde et Gérard Genette déposé à l'EHESS, en offrant un rare document: un récit de "La Mort de Marcel" par Bergotte, exhumé une première fois à l’automne 1987 dans le second numéro de l'éphémère Journal littéraire d’Alain Garric.
L'imaginaire des styles

Les figures sont considérées comme une forme saillante et particulièrement représentative de l’elocutio rhétorique : objet, depuis l’Antiquité, d’innombrables formalisations, voire d’une "rage taxinomique" (Barthes) qui a pu contribuer à leur désaveu, elles recouvrent la catégorie ambigüe des ornements nécessaires, essentiels, en théorie, à l’art du bien-dire mais ouvrant la voie aux pires corruptions du style. Aussi observe-t-on l’éternel retour, à travers les siècles, d’un débat pour ou contre les figures, et d’une méfiance tenace à leur égard, valorisant en creux l’idéal d’un style nu qui en ferait l’économie. Leur description théorique s’accompagne souvent d’avertissements restrictifs sur leur emploi en discours. Ces scrupules, doutes et censures sur les audaces des figures ne sont pas l’apanage des rhéteurs de l’Antiquité et de l’Ancien Régime : dans la perspective grammaticale qui caractérise la critique littéraire à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle, le tour figuré demeure un lieu crucial d’observation et de censure. Les articles réunis par S. Duval et I. Vidotto pour la livraison d'Exercices de rhétorique consacrée aux "Pratiques et censure des figures de rhétorique de l'Antiquité au XXe s." s'attache ainsi à étudier l’évolution des imaginaires du style.
(Illustr.: Walter Krane, Les chevaux de Neptune, 1895, Neue Pinakothek)
Finir l'année 2020…

Toute l'équipe Fabula vous souhaite d'en finir le plus heureusement possible avec l'année 2020, annus horribilis par bien des aspects mais qui a néanmoins apporté son lot de parutions stimulantes et d'heureuses initiatives dont le site garde la mémoire dans l'album de l'année écoulée : retrouvez regroupés sur une seule page l'ensemble de nos éditoriaux qui sont venus, de semaine en semaine, signaler les livres, ouvrages collectifs, numéros de revue et rééditions importants, saluer les essais en prise sur des débats de société ou les questions les plus vives, cartographier les ressources du web littéraire, ou afficher les contenus élaborés par Fabula : les nouvelles entrées de l'Atelier de théorie littéraire, les sommaires d'Acta fabula qui fêtait en 2020 ses vingt ans d'existence et une soixantaine de dossiers critiques, les derniers numéros de la revue Fabula-LhT, ainsi que les volumes des Colloques en ligne mis en ligne chaque mois.
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Et s'il est encore temps d'écrire au Père Noël, sachez enfin que l'OuLiPo, toujours secourable aux écrivants en panne d'inspiration, a réuni une efficace collection de Vraies lettres inventées au Père Noël (Flamarion/Librio), "écrites par tout plein de gens qui sont devenus très très connus, comme la petite Edith Piaf ou encore Jean-Claude Van Damme ou alors même Sherlock Holmes, ou bien encore des lettres un peu bizarres, comme par exemple des contraventions ou bien des lettres d'amour ou encore des publicités…" Fabula vous invite à feuilleter l'ouvrage…
Jean Paulhan existe bien

Au lendemain du décès du fondateur du Collège de 'Pataphysique en mai 1957, Jean Paulhan, le "concierge de la Nouvelle Revue française", ayant insinué que le docteur Sandomir n’avait "sans doute jamais existé", les Pataphysiciens entreprirent une campagne par voie de cartes postales proclamant que "Jean Paulhan n’existe pas". Plus de cinquante après sa propre disparition, Jean Paulhan est pourtant plus vivant que jamais, comme en témoigne la nouvelle livraison de la revue Littérature, qui dresse un premier bilan des recherches en cours sur les archives d'un théoricien qui a joué un rôle central dans l'histoire littéraire du XXe s., ou l'article que consacre F. Demont à sa phénoménologie de la lecture dans la récente livraison d'Exercices de rhétorique consacrée aux figures. De Jean Paulhan, il est aussi souvent question sur Fabula, qui héberge les actes d'un colloque "Jean Paulhan et l'idée de littérature", dont la revue Acta fabula a consacré un dossier au centenaire de la NrF, et qui rend régulièrement compte des ouvrages consacrés à l'auteur des Fleurs de Tarbes, dont l'essai d'Éric Trudel sur La Terreur à l’œuvre recensé en son temps par Perrine Coudurier. On pourra aussi relire dans le numéro de Fabula-LhT consacré au bovarysme, l'article de M. Macé intitulé "Rejoindre une forme".
(Illustr.: Carte postale éditée par le Collège de Pataphysique en décembre 1957).
Poésie et vérité

Représenter ou constituer une parole "vraie", à même de produire des effets de vérité : telle est l'ambition "poétique" étudiée par le 24e numéro de Fabula-LhT : littérature, histoire, théorie. Sous le titre Toucher au « vrai » : la poésie à l'épreuve des sciences et des savoirs, l'ensemble livre une douzaine de réflexions sur la nature de cette ambition et sur les formes de ces effets, différents du savoir philosophique comme des résultats objectifs et mesurables de la science, au sens moderne du terme, mais non pour autant purement subjectifs ou strictement "poétiques". Coordonné par Annick Ettlin et Jan Baetens, le numéro couvre des périodes très variées, du Moyen Âge aux écritures plus contemporaines, dans une attention à un large éventail de styles et de genres. Comme de coutume, un dossier critique de notre revue des parutions Acta fabula accompagne ce sommaire, pour proposer un état-présent des travaux sur les savoirs de la poésie.
(Illustr.: P. Éluard, Poésie et vérité, 1942 ; Neuchâtel : La Baconnière, [1943])